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Crise économique : faut-il tailler dans la force de vente ?

  • Elodie Colin-Petit
  • 14 mai
  • 3 min de lecture

Quand la mer se déchaîne, faut-il vraiment commencer par alléger l’équipage… ou consolider les appuis ?

Ces derniers temps, plusieurs échanges menés avec des dirigeants issus d’industries très différentes, font remonter une même interrogation. Dans un climat économique sous tension, face à des arbitrages budgétaires plus serrés et une pression accrue sur les marges, faut-il, ou non, réduire la taille des équipes commerciales ?

Soyons clairs : la réduction d’effectifs commerciaux peut être un choix pertinent. Dans certaines configurations, c’est même un levier nécessaire pour simplifier une organisation devenue trop lourde, désengager des collaborateurs peu investis ou réaligner les ressources sur les zones les plus stratégiques. Il arrive aussi, en contexte de procédure collective, que cela permette de débloquer une situation figée depuis longtemps.

Mais si cette décision est prise sans accompagnement, sans pilotage de la suite, sans vision partagée en interne comme en externe, les effets recherchés à court terme peuvent s’effacer face à des impacts plus profonds, plus silencieux, mais bien réels.



Derrière les chiffres, une autre dynamique parfois à l’œuvre


Prenant l'exemple cette fois-ci d'entreprises déjà "passées à l'acte". 

Plusieurs autres dirigeants également rencontrés ces derniers mois m’ont confié s’être appuyés sur leurs indicateurs pour décider. Taux de transformation en baisse, coûts commerciaux trop élevés, efforts jugés peu rentables sur certains segments : les tableaux de bord paraissaient limpides.

Et pourtant, quelques mois après la mise en œuvre, certains ont observé un phénomène qu’ils n’avaient pas anticipé : une baisse progressive de l’engagement client, une perte de récurrence dans les commandes, un allongement des cycles de décision, et parfois même un doute exprimé par les clients eux-mêmes quant à la présence commerciale de l’entreprise.

Dans une PME industrielle, la réduction de trois postes sur sept a permis de préserver la marge brute à court terme. Mais six mois plus tard, le portefeuille actif avait perdu plus de 10  % de sa valeur. Non pas par colère ou rupture frontale, mais par désengagement diffus.

Dans une autre structure de type ETI, le choix de ne pas remplacer les départs naturels, combiné à une exigence commerciale inchangée, a conduit à une surcharge pour les équipes restantes, et à une série de démissions non prévues.

Ces situations ne sont pas des erreurs de gestion. Ce sont des effets secondaires d’une décision légitime mais incomplète si elle n’est pas accompagnée.



Avant de couper : revoir les équilibres, interroger les priorités


Inversement, pour que ayez une vision complète du sujet, j'aimerais aussi vous parler des dirigeants qui ont envisagé de réduire, puis ont choisi de transformer. 

Ils ont commencé par poser les questions : À quoi sert notre force commerciale aujourd’hui ? Que lui demandons-nous réellement ? Est-elle structurée pour convertir, fidéliser, prospecter… ou un peu tout à la fois, sans cadre clair ?

Ce travail, quand il est bien mené, fait souvent émerger des alternatives à la réduction frontale :

·        Repenser la couverture des comptes et redéfinir les priorités.

·        Clarifier la répartition des rôles avec l’ADV (Administration des Ventes) ou le marketing.

·        Optimiser les outils et processus, parfois trop contraignants ou redondants.

·        Identifier des zones à potentiel mal exploitées faute d’organisation adaptée.

Ce que certains voyaient comme un plan de réduction s’est transformé en plan de réalignement. Et les résultats n’en ont été que plus durables, à la fois sur le chiffre et sur l’adhésion des équipes.



Et si réduire est la bonne option, alors accompagnons-la pleinement

Soyons clairs, la réduction reste parfois la seule voie possible. Et ce n’est ni un tabou, ni un échec. Ce qui fait toute la différence, c’est la manière dont cette décision est prise, expliquée, structurée et suivie.

Les entreprises qui l’ont bien vécu ont :

·        anticipé les impacts internes (charge, moral, cohésion) ;

·        communiqué avec clarté sur les raisons et les objectifs ;

·        mis en place des relais ou des solutions de transition (temps partagé, commerciaux externalisés) ;

·        redéfini les priorités commerciales de manière opérationnelle, pour que l’effort se concentre là où il est le plus utile.

Réduire n’est jamais anodin, mais cela peut être un acte de management responsable, s’il s’inscrit dans un cadre clair et tourné vers l’avenir.



Réduire, oui mais jamais à l’aveugle.

En conclusion, la vraie question selon moi n’est donc pas « réduction ou pas réduction ». Elle est : réduire pourquoi, comment, et dans quel but ? Car ce n’est pas uniquement une réorganisation interne dont on se parle, c’est aussi un signal envoyé aux équipes, aux clients, et parfois aux concurrents. 


Dans la tempête, certaines entreprises coupent pour tenir. D’autres coupent pour repartir. Mais les plus solides gardent une vision claire, même quand elles doivent réduire la voilure. Et dans cette équation, la fonction commerciale ne peut pas être traitée comme une simple variable d’ajustement. Elle porte encore, et peut-être plus que jamais, la continuité du lien, la compréhension du client, et la capacité à regagner du terrain quand le calme reviendra.

 
 
 

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